Bienvenue dans le plus populaire des trails du Nord (dans le Pas de Calais pour être plus précis), celui où tous les gars du coin font leurs classes, se retrouvent et préparent des courses plus lointaines. C’est un monde à part et cette année il m’a donné l’immense plaisir du sentiment d’appartenance.
Il y a pour moi dans le sentiment d’appartenance quelque chose de tribal. C’est de l’ordre paléolithique, quand les communautés humaines se comptaient en quelques dizaines d’individus. Tout le contraire de notre monde surpeuplé où on peut vivre assez bien sans connaitre ni le nom ni rien de notre voisin dans la ville. C’est bon de se sentir avec les siens et c’est vraiment ce que j’ai ressenti toute la journée.
- Il y a d’abord les gars du JCB, le Jogging Club de Bully que j’avais rencontré quelques semaines plus tôt pour leur entrée dans la confrérie lors de la sortie à Gand. Les 4 compères rencontrés à Gand ne couraient pas le jour de leur trail, on les rencontrait partout, à la remise des dossards, en tant que signaleurs, aux nombreux ravitos et dans la salle d’arrivée. Merci beaucoup Christophe, Hervé, Fabien et Jeremy, c’est vraiment super d’être accueillis comme ça.
- Il y a aussi les éclopés de l’ACVA, TomTom et Olivier, qui étaient venus encourager leurs collègues. Se lever à 4h du mat pour se retrouver au bord d’un chemin dans un petit matin bien frisquet, il faut une sacré énergie et je n’en reviens pas encore.
- Toute la confrérie des Horizons était là aussi. J’ai été très étonné par le nombre de confrères qui m’ont reconnu avec mon chapeau. Sur la centaine de confrères, on était sans doute presque tous là.
- Il y a aussi les Bigorex qui avaient organisé une belle sortie dans la somme pour la confrérie, le Poppy Tour. J’ai passé quelques heures en compagnie de Denis. On s’est soutenu jusqu’au ravitaillement du 68° mais comme il avait un coup de mou, il m’a demandé de repartir tout seul. J’espère qu’il a fini sa course.
- Ne pas oublier aussi mon club, l‘ACVA-VAFA. On était très nombreux dans le peloton (et aussi sur les podiums) ce jour là. Comme les départs des 3 distances étaient simultanés, on a pu faire une belle photo de famille avant de partir et j’ai vraiment apprécié l’ovation qui m’a été faite à l’arrivée. Je suis arrivé le dernier mais j’étais très heureux et j’ai rempli mon petit objectif en finissant en courant en moins de 12 heures.
- Et ce n’est pas fini car il y a aussi les Coureurs Célestes qui étaient présents en grand nombre à l’arrivée. Eux aussi se souvenaient de moi, ou plutôt de mon chapeau. Un des céleste se souvenait aussi de mon CR de l’Ultra Tour de Lièges qu’ils organisent tous les 2 ans. J’espère que je pourrais y retourner le 18 octobre prochain.
Ma course
Mon objectif principal était de finir en courant le plus possible et si possible, de finir « fort » à la fin. Pour le temps je ne sais pas trop mais comme parcourir 88 kilomètres à 7 kilomètres par heure de moyenne donne 12h30, je m’étais dit que faire moins de 12 heures serait une bonne performance.
J’avais prévu de partir tranquillement avec Jean Yves mais dans la nuit j’ai perdu tout le monde de vue et je suis parti tout seul. Comme le début est commun aux 3 distances, j’ai pu croiser pas mal de gars de l’ACVA au début. J’ai retrouvé Jean Yves à un moment mais il n’était pas du tout raisonnable et courait beaucoup trop vite pour moi et je l’ai laissé partirr devant sans regret. Au 20° (ou bien était-ce le 30°) à Vimy je me suis fait plaisir en faisant semblant d’être en forme et en doublant Manu et Jer pendant qu’ils pissaient. Je n’ai pas fait illusion longtemps et ça commençait déjà à pas être évident pour moi. Un peu avant le 40° je crois que j’ai commencé à faiblir. Dom et Jéjé m’ont rattrapé et m’ont soumis à la tentation de faire comme eux : bifurquer sur le 48° parce que 88 kilomètres ça risque d’être fatiguant. A ce moment là la proposition était très tentante mais je ne sais pas pourquoi, j’ai résisté à la tentation. Ça m’a fait penser à l’Origole et sa terrible tentation d’arrêter à la fin de la deuxième boucle.
Après le ravito du 40° c’était bien dur. J’ai rencontré Ben et on n’est pas resté longtemps ensemble, il était sur le 66. A la mi chemin j’ai commencé à trouver un meilleur moral. Savoir qu’il reste moins de kilomètres à faire que de kilomètres parcourus est bon pour le moral. J’ai basculé l’affichage de ma montre sur la distance parcourue.
A ce moment ma devise était de profiter « hic et nunc », c’est à dire de profiter du moment présent dans le lieu présent. Cette devise fonctionne assez bien pour accompagner le lent égrainement des kilomètres et des heures. C’est comme un verre à moitié vide (c’est interminable, mais qu’est-ce que je fou là…) et un verre à moitié plein (mais qu’est-ce qu’on est bien, que la nature est belle, as-tu entendu ces oiseaux chanter, le lever de soleil est sublime…). En ultra on est obligé de philosopher plus ou moins…
Après le 50° kilomètres Denis, des Bigorex m’a rattrapé dans une descente et nous avons fait un bon bout de chemin ensemble. Il prétend que c’est moi qui l’ait trainé mais je crois moi que c’est lui qui m’a donné des ailes pour atteindre le ravitaillement du 68°. On ne nous a que très peu doublé dans cette partie de la course, sauf sur la fin quand Denis a eu un petit coup de mou. Je l’ai attendu un peu et accompagné jusqu’au ravito. Au ravito je me suis enfilé 2 bon verre de bière et je suis reparti tout seul en pleine forme.
Cette relative pleine forme ne m’a pas trop quitté jusqu’à la fin de la course. Pendant la montée vers Lorette je me suis amusé à doubler un VTT qui en chiait sur une montée très raide. On a un peu papoté et j’ai adoré cette idiotie, ce gâchis de calories pour un résultat inutile. Au ravito de Lorette j’ai rencontré Christophe du JCB qui m’a offert une bonne merguez et je suis reparti le plus vite possible, un verre de bière à la main. J’ai doublé pas mal de monde, ait été redoublé dans une descente mais j’ai vraiment fini en pleine forme en courant tous les faux plats montants qui me séparaient de l’arrivée. A chaque fois que j’ai rattrapé un autre concurrent, j’ai adapté ma vitesse à la sienne pour discuter un petit peu avant de repartir. Ces petits moments minables du plaisir de dépasser un autre sont ainsi « transcendés » par le dialogue et le partage de petites impressions et mots d’encouragement. Je me suis souvenu d’avoir eu le même plaisir la dernière fois que je suis passé sur ce triste chemin (lors du précédent trail Bullygeois des poilus), se sentir bien sur la fin d’un ultra, je ne connais vraiment rien de plus fort.
Finalement 11h32 – 7,6 km/h de moyenne, je suis ravi, j’ai l’impression que j’ai rarement fait mieux.
Alimentation.
Toujours en quête d’un système d’alimentation auquel je puisse me raccrocher pendant les ultras j’ai testé pour vous une nouvelle variante du régime paléo : le 100% saucisse de Montbéliard.
Après mes expériences douteuses de course à jeun (52 km des Coteaux de l’AA) et aussi de tentative de Paleo Low Carb (12 Labour of Hercule) j’ai testé un produit miracle : la saucisse fumée de Montbéliard. Une composition parfaitement paléo (70% lipides – 30% protéines), un goût agréable, une concentration impressionnante de calories et un mode de conservation plus paléo que d’autres (la fumée au lieu des classiques Nitrites de Sodium).
Résultat de l’expérience : pas terrible. J’en ai mangé une au petit déjeuner, une autre au 20° kilomètre et la troisième au quarantième. J’avais prévue une quatrième au soixantième kilomètre mais je n’ai pas pu. Les saucisses de Montbéliard sont vraiment indigestes, c’est très désagréable de se rendre compte qu’elles sont encore « là » 2 heures après en avoir mangé une et c’est bien connu dans le monde de l’ultra trail, les trucs indigestes c’est pas trop pour les jours de course.
Je n’ai pas encore dit mon dernier mot au sujet des saucisses de Montbéliard. Peut être qu’il ne faut pas les manger crues le jour de la course ? Une amélioration possible du système serait de tester les saucisses de Montbéliard cuites. Seront-elles plus digestes ? Vu mon programme de cette année, je vais avoir tout le temps de faire de nouvelles expériences.
Matos
- Les Cascadia 10 étaient parfaites. Comme le sol était très sec (même le fameux grand fossé d’Ablain était à sec) les crampons de mes Speedcroos ne m’ont pas manqué.
- J’ai pu me servir de ma nouvelle frontale Stoots Focus le matin et je suis bien content de n’avoir pas du la ressortir le soir.
- J’ai porté toute la journée ma SoftShell Terrex Addidas sur un T-Shirt manche longue en mérinos. C’était le bon couple, respirant et coupe vent. Je me suis aussi servi de la capuche pour me réchauffer les oreilles entre Fresnicourt le Dolmen et le fossé d’Ablain.
- Plus de problème avec mon Ambit. 87.34 kilomètres et 1838m de D+ d’après elle. Il faudra que je me fasse un paramétrage des information affichées sur les écrans plus adaptée aux ultra. J’ai utilisé un affichage de la vitesse instantanée (en temps par kilomètre) pendant la première moitié et ensuite un affichage du temps écoulé et de la distance parcourue pour la suite de la course.